COVID-19 : vers une structuration de la recherche en SHS

Date : 18/06/2020


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Dès les premiers jours de la pandémie Covid-19 et du confinement, les sciences humaines et sociales (SHS) se sont mobilisées pour proposer des pistes de recherche.

Constitution d’un collectif

Très rapidement, la MSH Alpes, en collaboration avec le laboratoire de sciences sociales Pacte, a lancé un appel à constitution d’un collectif de travail interdisciplinaire en SHS visant à étudier l’impact sociétal du Coronavirus. Diffusé au sein de la communauté SHS via les MSH, le Réseau national des MSH et les structures de recherche, cet appel vise à “suivre, documenter et anticiper collectivement et de manière interdisciplinaire les conséquences de la pandémie de Coronavirus sur nos modes de vie, nos organisations et nos territoires“.

Cette action relayée par le Réseau National des MSH fait partie du dispositif national coordonné par le CNRS et l’Inserm, HS3P-CrISE.

“Plus de 600 contributions”

Le succès de cet appel appelé CODE-VIRUS (Coordination interDisciplinaire pour l’Etude de l’impact sociétal du CoronaVIRUS) a été immédiat et on recense aujourd’hui plus de 600 propositions de contributions. Des contributions de toute nature, allant de la “simple” déclaration d’intérêt pour l’initiative de structuration, à l’annonce de la constitution d’une équipe de recherche positionnée sur un axe, en passant par des suggestions de thématiques pour solliciter des collègues d’autres universités et MSH, ou d’autres disciplines de recherche. Les propositions reçues reflètent la très large diversité de disciplines et abordent diverses thématiques (art, archéologie, architecture, anthropologie / sociologie, éducation, environnement / écologie, éthique, géographie, histoire, philosophie, psychologie…).

Les SHS ont aussi leur rôle à jouer

Les objectifs et visées de ce collectif initié par la MSH Alpes sont clairs et partent d’un constat fait dès les premiers temps de la pandémie : si le contexte Covid mobilise légitimement les sciences biomédicales et sanitaires, il interpelle fortement les SHS. Il constitue en cela une opportunité pour elles de produire des connaissances et des analyses complémentaires, sans doute indispensables pour éclairer cette crise et en tirer d’utiles enseignements :

  • Débats sur la prise en charge des populations vulnérables et âgées, à domicile et en établissements
  • Replongées dans d’autres contextes pandémiques (Ebola, SRAS, pestes, choléra…)
  • Incidences du confinement sur l’accompagnement pédagogique
  • Identification d’indicateurs sociaux et spatiaux pour éclairer la circulation du virus
  • Interrogation sur les restrictions des circulations humaines (cadre de la loi, libertés individuelles et collectives, données numériques…)

La mobilisation des SHS apparaît aussi évidente que nécessaire.

Le périmètre de la MSH Val de Loire

Les manifestations d’intérêt de chercheurs du périmètre de la MSH Val de Loire pour cette initiative de constitution d’un réseau national ont été nombreuses. Pour une plus grande visibilité -commune- de notre MSH, un travail de compilation de ces manifestions d’intérêt a été entrepris. Ce travail vise à recenser les chercheurs qui se sont montrés intéressés par la démarche, mais aussi à identifier les thématiques à partir desquelles ces chercheurs proposent de contribuer à la réflexion sur le Covid-19. L’idée n’est pas d’en dégager une en particulier et de la soumettre au nom de la MSH Val de Loire mais bien de faire le point sur la façon dont chacun.e, de par sa discipline de rattachement, ses centres d’intérêt et questionnements de recherche, imagine une possible contribution à ce collectif SHS.

Sur le même “objet” Covid-19, les premières analyses des propositions reçues (une vingtaine) font immédiatement apparaître une riche diversité, aussi bien en termes d’angles de recherche, de questionnements que de méthodologies. Cette diversité de contributions possibles, outre qu’elle démontre la vitalité de la recherche sur notre territoire régional, invite à réfléchir à des coopérations et des possibilités d’associer nos compétences complémentaires.

Citons ici deux contributions concrètes de chercheurs locaux aux réflexions sur les impacts sociétaux du Covid-19 en écho ou initiées dans le cadre de la démarche de la MSH Alpes :

  • Une coopération entre psychologues des Universités de Tours (PAVEA – EA 2114) et de Lyon (GRePS – EA 4163) porte sur la continuité pédagogique en période de confinement, avec des questionnements sur le stress académique perçu, sur la santé perçue et sur le mode de coping chez les étudiants. Un questionnaire est actuellement proposé en région Rhône-Alpes via le Service Santé Universitaire (SSU).
  • Une mobilisation de chercheurs en psychologie et en sociologie de l’Université de Tours (coopération CITERES-COST– UMR 7324, Usetech’lab et PAVeA – EA 2114) en réponse à une sollicitation de collègues gériatre et psychiatre du CHU de Tours qui ont souhaité, dès le début du confinement, accompagner des équipes soignantes en première ligne face à la pandémie. Depuis mi-mars, des séances hebdomadaires “débriefing des équipes Covid-19” sont proposées aux soignants (médecins, IDE, AS, psychologue…) de quatre services de gériatrie. Les soignants évoquent librement leur vécu de l’impact du virus sur leurs pratiques, leurs prises en charge des patients / résidents, leurs coopérations, les conflits de légitimité et culpabilité (soigner mais potentiellement contaminer), et travaillent aussi le lâcher-prise collectivement… Ces séances, d’à peine une heure, sont co-animées par un psychiatre du CHU (en présentiel) et un binôme sociologue et psychologue (à distance, par obligation). Face à la richesse des échanges et matériaux collectés, et sur le souhait partagé des soignants et des chercheurs, ces séances devraient se poursuivre et s’installer dans la longue durée.

“Vers un renforcement du positionnement de nos équipes au sein des réseaux thématiques”

L’initiative de la MSH Alpes, rejointe aujourd’hui dans la coordination par la MISHA (Strasbourg) et la MSHS-T (Toulouse), rencontre un grand succès, et cela au-delà même des frontières nationales. Le travail de coordination effectué par la MSH Val de Loire doit permettre d’accroître la visibilité des recherches et réflexions présentes au niveau local. Elle vise également à renforcer les coopérations, entre disciplines, et à une autre échelle avec des équipes présentes sur d’autres territoires. Elle peut par ailleurs contribuer à renforcer notre positionnement au sein de réseaux thématiques. A titre d’exemple, sur la thématique santé et vieillissement, la Plateforme nationale pour la recherche sur la fin de vie qui sollicite fortement les SHS et appelle au renforcement des collaborations entre chercheurs issus du champ biomédical et sanitaire et chercheurs issus des sciences humaines et sociales.

Contact

La coordination pour la MSH Val de Loire est assurée par Jean-Philippe Fouquet (jean-philippe.fouquet@univ-tours.fr).