[Séminaire] « Faire ensemble » : entreprises récupérées et coopératives de travail en Argentine

Date : 09/11/2017
Lieu : Université de Tours, site des Tanneurs, salle des Actes - 14h00-16h30


Résumé de l’intervention de María Inés Fernández Alvarez :

Ces quinze dernières années en Argentine, les coopératives de travail se sont développées de manière significative. Des pratiques d’autogestion ont été mises en place lorsque des entreprises ont été récupérées par leurs travailleurs et une série d’initiatives ont été lancées par les cartoneros(ramasseurs de déchets) et, plus récemment, par les buscas (vendeurs ambulants). En même temps, ces modalités de travail associatif ont été un axe central de l’intervention de l’État, avec la mise en place de 2003 à 2005 d’une série de politiques publiques dites « d’inclusion sociale » qui ont promu la formation de coopératives en tant que modalité de création d’emplois.

La communication synthétisera mon parcours de recherche, depuis 2002, avec des entreprises récupérées et d’autres coopératives de travail de l’économie populaire. Depuis une approche d’ethnographie collaborative, j’ai analysé ces expériences en tant que pratiques collectives visant à garantir la (re)production de la vie. Ma recherche s’intéresse à l’expérience quotidienne et aux dynamiques d’articulation de ces pratiques collectives avec des modalités de domination et de gouvernement. Elle s’appuie sur une approche anthropologique de la politique collective qui déplace le regard, souvent focalisé sur l’événement (la mobilisation, la protestation et les moments ouverts de dispute), pour analyser les processus, les sujets et les rapports qui les produisent.

Il s’agit d’interroger comment, à travers ces pratiques, la précarité est expérimentée collectivement, des droits collectifs sont produits et disputés, et des modalités de « faire ensemble » sont créés. L’analyse porte, d’une part, sur comment ces pratiques « de travail » font partie d’une dynamique de (re)production de la vie dans un sens large du terme, pour s’agencer avec un ensemble d’activités qui touchent la participation politique, le soin des enfants, des rapports familiaux, des espaces de formation, etc. La réflexion concerne, d’autre part, ce que produit ce processus en termes de langages, de projets politiques et de constructions collectives sur l’avenir et le bien-être, en interrogeant des notions socialement et historiquement construites autour du travail salarié.